Homélie du Troisième dimanche du Temps Ordinaire/Année C
En
quittant la messe de ce dimanche qui fait partie de la semaine de prière pour
l’unité des Chrétiens, il nous suffira de garder en esprit le triple concept :
COMMUNAUTE-UNITE-CHARITE, pour avoir l’essentiel du message que le Seigneur
nous adresse en ce jour.
Dans
la célébration liturgique de la parole de Dieu que nous décrit le livre de
Néhémie, se profile la vraie identité du Peuple de Dieu qui est une Assemblée sainte,
une Communauté d’hommes, de femmes et d’enfants qui se réunit, non pour parler argent
ou politique, mais pour célébrer les merveilles de Dieu. Au cours de cette
célébration se démontrent la centralité, l’efficacité et l’actualité de la
Parole de Dieu qui va se révéler pleinement par la personne du Verbe incarné :
Jésus-Christ, présenté par l’évangile de ce jour comme Parole de Dieu, qui
se réalise ici et maintenant : « Aujourd’hui
s’est accomplie cette parole que vous avez entendue » («Oggi
si è compiuta questa Scrittura che voi avete ascoltato»). En effet, la
parole de Dieu, proclamée et vécue, constitue avec l’Eucharistie, non seulement
le premier signe visible de l’Eglise, mais également sa plus grande richesse.
Et ce n’est pas une moindre indication de ce qui unit les chrétiens que d’insister
sur cette richesse en cette semaine qui se clôture dès demain par la fête de la
Conversion de celui qui nous dit dans la deuxième lecture que nous sommes un seul
Corps : le Corps du Christ. Oui, nous avons été
baptisés pour former un seul corps (Cf. 2ème
lecture). Ce Corps qui est aujourd’hui l’Eglise que nous formons, pourrait bien
se réjouir de découvrir ses racines vétérotestamentaires dans le Peuple de Dieu
réuni en Assemblée liturgique par le prêtre Esdras.
Le décor de solennité de la parole de Dieu présenté par le livre de Néhémie
dans la première lecture décrit le temps fort de la « re-construction »
de l’identité du Peuple de Dieu, meurtri en ce temps-là, par l’humiliation de
l’exil à Babylone. Et si, suivant l’ordre providentiel du souverain païen
Cyrius, il fallait reconstruire le temple, pour ceux qui en avaient charge, il
faillait d’abord consoler le Peuple, le guérir de ces blessures, le revigorer en
lui redonnant l’espérance de sa foi en Dieu. Néhémie, le gouverneur, Esdras, le
prêtre et le scribe et les Lévites, donc politiques et religieux de ce
temps-là, vont s’atteler à cette tâche commune. Car, un peuple qui a perdu son
identité et sa dignité, n’est point libre. On aura beau lui construire des
temples (comme aujourd’hui les hommes politiques aiment financer les
constructions de cathédrales), s’il ne retrouve pas son identité et sa dignité,
c’est qu’il est en exil dans ses propres murs. Néhémie et Esdras n’en étaient
pas dupes. Ils célèbrent donc la parole, pour inciter à la conversion, réconfortent
et annoncent enfin le jubilé : « Ce jour est consacré au Seigneur
votre Dieu ! Ne prenez pas le deuil, ne pleurez pas ! »…. « Allez,
mangez des viandes savoureuses, buvez des boissons aromatisées, et envoyez une
part à celui qui n’a rien de prêt. Car ce jour est consacré à notre Dieu !
Ne vous affligez pas :la joie du Seigneur est votre rempart ! ».
Disons, avant d’y revenir que le Christ posera ces mêmes gestes à caractère
prophétique. L’Esprit de Dieu…m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux
pauvres.
Ici, pourrions-nous l’affirmer, le cadre de la célébration eucharistique
que nous connaissons aujourd’hui, se dessinait déjà en filigrane dans cette
Assemblée liturgique néhémitique où la parole de Dieu est lue, l’acte de
contrition, déclenché, le pain et le vin, partagés et la charité programmée. « Ne
pleurez pas....Mangez….Buvez…. et envoyez une part à celui qui n’a rien de
prêt ». Une telle Assemblée, priant, pleurant et partageant, on peut
la rencontrer au Brésil, à Campinas, au Sanctuaire de « Marie qui
défait le nœuds », où après la messe, des tasses de soupe et des
gâteaux sont distribués gratuitement aux pauvres. Ce qui oblige à reconnaître
que les danses trempées de sueur au cœur des célébrations eucharistiques à l’africaine
perdent leur sens lorsqu’elles ne débouchent pas sur le partage. Dans
l’Assemblée sainte que la liturgie de cette messe nous fait contempler, l’écoute
des paroles de la Loi avait pour vocation de rappeler au Peuple, la volonté de
son Dieu ; une volonté qu’il acceptait en répondant : « Amen !
Amen ! » ou qu’il méditait et appliquait pour une joie parfaite qui
se transformait en rempart de Dieu : la joie du Seigneur est votre rempart.
Enfin, au cœur d’une autre Assemblée réunie dans la Synagogue de Nazareth, le
Christ revenu sur sa terre, mais pas d’un exil, se démontre, de manière
solennelle, le Centre de la liturgie, comme le montre l’évangile de ce jour. Lui,
Parole du Dieu vivant, Prophète par excellence, venu accomplir jusqu’au bout la volonté du Père et rassembler
du milieu des hommes, un peuple saint qui lui appartienne (cf. 6ème
Préface commune), est celui qui réalise les promesses messianiques faites au
Peuple : « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur
m’a consacré par l’onction.
Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération,
et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, annoncer une année favorable accordée par le Seigneur ». Parole réalisée et Réalisation de la parole, il referma le livre, le rendit au servant et s’assit. Ici, le Livre se laisse donc remplacer par sa personne. Désormais c’est lui qui rassemble le Peuple, le nourrit de son Corps et de son Sang, pour en faire un Corps, c’est-à-dire, une Unité, une Identité.
Partant de l’analogie avec le corps humain,
Saint Paul dans la deuxième lecture fait ressortir les raisons qui sont à base
de l’Unité de l’Eglise, Corps du Christ. Le Christ unit à soi, les
baptisés devenus membres de son Corps par les liens sacramentels ; entre
eux, il y a complémentarité de charismes et interdépendance,
ce qui n’entrave pas la hiérarchie qui se met au service de tous, à commencer
par les membres les plus insignifiants.
Puissions-nous nous laisser attirer et éclairer par
l’Esprit Saint qui fait de nous, Peuple de Dieu, Membres du Corps du Christ à
la gloire du Père. Amen !
Père Moïse KOUMAKPAÏ, Rome
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